Formé à Newcastle où ils impressionneront par leurs live déjantés, Colosseum sortira pas moins de 4 albums en trois ans au confluent du jazz, du blues et du rock, faisant preuve d’une créativité débordante et d’une technicité au dessus de la moyenne. Ils seront également les premiers à graver un disque sur la cire du fameux label à spiral Vertigo, tout en étant les précurseurs du rock progressif anglais avec la suite en 3 parties de plus de 17mn sur la face B de leur second album, Valentyne Suite. On y reviendra.
Le groupe naît de la rencontre de 3 anciens Bluesbreakers de John Mayall, le batteur Jon Hiseman, le saxophoniste Dick Heckstall-Smith et le bassiste Tony Reeves. Auquel vient se greffer l’excellent organiste Dave Greenslade . Le combo part alors à la recherche d’un guitariste, recrutant dans un premier temps Jim Roche, pour finalement le remplacer par le guitariste-chanteur Jim Litherland. Qui par son timbre de voix donnera une nouvelle ampleur aux compositions du groupe .
Leurs premiers pas scéniques sont acclamés alors par la foule, et la critique est unanime, impressionnée par le son déployé par Colosseum, à la fois ample et opaque, s’aventurant dans un courant jazz sans en oublier leur amour du blues.
Un premier album voit finalement le jour assez vite. Signé sur Fontana, Those Who Are About To Die Salute You, s’il confirme la virtuosité des acteurs et qu’il ne dénigre pas ces racines blues, reste mélodiquement assez faible. Mais déjà, les prémices d’une révolution sonore se font sentir à travers ce sublime Beware The Ides Of March qui en un peu plus de 5mn nous gratifie d’une ballade progressive où chaque musicien s’illumine techniquement dans une cohésion quasi parfaite.
Seulement quelques mois après ce premier opus sort Valentyne Suite sur Vertigo. Un chef d’œuvre de bout en bout, où le groupe explore tous les styles d’alors, du rock buriné The Kettle, qui ouvre l’album en passant par un jazz rock innovant puisant sa sève dans le blues. Les Colosseum sont au sommet de leur créativité artistique, et contrairement au premier album, privilégie la mélodie au détriment de leur virtuosité. Ce qui fera tout le charme de cette face B, éponyme à l’album. S’étirant sur 17 minutes, Valentyne suite, mouvement en 3 thèmes, est une construction progressive ambitieuse et particulièrement réussie. La technicité des musiciens est mise au service d’une recherche mélodique particulièrement jouissive et inspirée, et s’exprime par une montée épique schizophrène et sacralisante. Assurément, le groupe cherche à dépasser les frontières et les codes du rock, puisant aussi bien dans le blues que dans le classicisme, et entrouvrant une porte vers de nouveaux horizons musicaux.
Valentyne Suite marche finalement assez bien. Ce qui permet au groupe d’entamer une série de concerts aux États-Unis. Sur le chemin du retour, le combo se sépare de Jim Litherland, gravant au passage un album destiné uniquement au marché américain, Grass Is Greener. Et c’est Chris Farlowe qui en prend la succession au chant, ajoutant une autre corde au groupe.
Daughter Of Time sort fin 1970, l’album se veut plus rock, mais garde toute sa dimension lyrique. Malheureusement, la voix de Chris ne se fond pas dans le collectif musical créé par les autres membres du groupe qui n’exploitent pas assez les compétences vocales d’un tel chanteur. Si la structure jazz rock est préservée, elle est beaucoup moins ambitieuse que ce second album, et de faites moins passionnantes. Néanmoins, la galette réserve de bons moments. La guitare revient au premier plan comme sur ce Downhill and Shadows, blues rock fertile en divagation guitaristique, ou encore Three Score and Ten, Amen, rock progressif lyrique. On appréciera particulièrement Theme For An Imaginary Western où la voix de Chris prend enfin toute son ampleur, amenant le morceau sur les hautes sphères du blues.
En 1971, suite à un concert flamboyant au Big Apple de Brighton, le groupe grave un double album live permettant de garder un témoignage plutôt réussi des Colosseum. Ce qui sera leur dernier album, Hiseman partant fonder Tempest, alors que Dick Heckstall-Smith s’aventurera dans une carrière solo. Une tentative de reformation avec Gary Moore verra le jour au milieu des seventies sous le nom de Colosseum II, mais échouera assez vite.
Colosseum restera l’une des pièces triangulaires du rock progressif anglais, au côté de Soft Machine et du Floyd, et l’une des plus intéressantes et créatives faces de ce mouvement. Bien loin de ce qui attendra le monde de la Pop boursouflée de groupes progressifs tout aussi pompeux les uns des autres.
PERSONNEL :
- _ 1969 : Those Who Are About to Die Salute You (Label Fontana STL 5510)
- _ 1969 : Valentyne Suite (Label Vertigo VO 1, Cote 100Euros)
- _ 1970 : The Grass Is Greener (Label Dunhill DS 50079, Pressage US)
- _ 1970 : Daughter Of Time (Label Vertigo 6360 017)
- _ 1971 : Live (Label Bronze 2XS 1942)
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